Vagin. Un mot tabou, dont on préfère les synonymes plus grivois, légers, familiers ou humoristiques. Dans son livre, Moïra Sauvage ne tourne pas autour du mot : elle l’utilise au moins cinq fois par page !
Et pour cause : elle consacre un ouvrage entier à la pièce de théâtre d’Eve Ensler, « Les monologues du vagin ». Mais au fait, c’est quoi, ces monologues ?
Une quinzaine de petits textes qui font comprendre comment les femmes vivent leur intimité et libèrent leur parole. Ils posent des questions : pourquoi cette partie si importante du corps des femmes est-elle taboue au point que son nom soit imprononçable ? Pourquoi le plaisir féminin est-il si mal compris, quand il n’est pas, dans certaines cultures, carrément nié ? Pourquoi la violence envers les femmes passe-t-elle si souvent par la sexualité ? »
L’idée de la pièce a germé dans l’esprit d’Eve Ensler, une dramaturge américaine victime de violences sexuelles dans son enfance. Qui a, elle aussi, constaté l’impopularité du mot de cinq lettres.
Essayez de le dire pendant que vous faite l’amour – « Chéri, caresse-moi le vagin ! » – vous foutez tout par terre, tout de suite. »
Manifestement, l’auteur a touché… un point sensible : la pièce a connu un énorme succès, au point de conquérir les petites et grandes scènes du monde entier. Ce succès est en grande partie dû à l’idée géniale d’Eve Ensler et de quelques-unes de ses amies, qui décident, en 1997, de faire jouer le spectacle par des personnalités. Le 17 février 1998, au Hammerstein Ballroom de Manhattan, Glenn Close, Whoopi Goldberg, Susan Sarandon, Winona Ryder et Calista Flockhart (Ally Mac Beal), donnent la première représentation, pour collecter des fonds pour les femmes victimes de violence.
Un véritable mouvement naît, bien avant #metoo et, de New York à Paris, de Haïti au Caire et de Pékin à Kaboul, les stars locales défendent le texte, parfois au péril de leur vie, pour faire progresser la cause des femmes blessées.
Un raz de marée qui ne recueille pourtant pas que des ovations…
Trop américaine, la pièce ?
Ce qui est considéré en Europe comme trop américain, c’est surtout cet enthousiasme, cette conviction que l’on va changer le monde simplement parce qu’on l’a décidé, symbole à nos yeux de l’immaturité de ce jeune pays. »
Trop féministe ?
En France, une philosophe comme Elisabeth Badinter craignait que des campagnes ciblant les violences faites aux femmes nient la violence qui existe dans les femmes elles-mêmes, comme en chaque être humain. »
« Les aventures de ce fabuleux vagin » est un ouvrage riche, intéressant et honnête. Du journalisme courageux, car l’auteur dit son admiration pour Eve Ensler, qu’elle a rencontrée, tout en restant parfaitement objective et rigoureuse dans le traitement de ses informations. Ceux qui veulent mieux comprendre la célèbre pièce trouveront dans cet ouvrage de qualité réponse à toutes leurs questions, et, peut-être, l’envie de participer à ce combat, hélas, loin d’être gagné.
Les aventures de ce fabuleux Vagin. Comment la pièce d’Eve Ensler fait reculer les violences contre les femmes, Calmann-Levy, 239 pages, 19 euros. Vous pouvez le commander sur Amazon.
"Combat loin d’être gagné"… mais en y croyant fort et à plusieurs.. Gardons l’espoir 😀
Super papier Bernard. Comme quoi ce combat des femmes et un combat pour toute l’humanité. Hommes compris, évidemment!
moïra a fait un travail formidable (dont on avait parlé dans Le Monde), il faut aussi aller voir la pièce dont le titre fait encore fuir ….
as-tu vu la pièce ?
Moi oui et je l’ai moult fois conseillée… aux femmes bien sûr mais surtout aux hommes.
Je ne trouve pas la pièce spécialement féministe si ce n’est dans le choix du thème lui-même…