Comme moi, vous êtes sans doute attentifs aux sons, aux odeurs, au goût et autres sensations. Mais Eric Fottorino vient de m’initier avec adresse aux plaisirs de la lumière dans ses multiples nuances.
Gilles Hector a vu le jour un peu par hasard.
Je ne sais rien de mes origines. Je suis né à Paris de mère inconnue et mon père photographiait les héroïnes. Peu avant sa mort, il me confia que je devais mon existence à un baiser de cinéma. »
Ces héroïnes, dont parle Gilles, sont les actrices de cinéma des films de Renoir, Chabrol et les autres. Mais le père de notre héros a emporté son secret dans la tombe. Alors Gilles se tourmente : est-il le fils de Jeanne Moreau, Anna Karina, Marthe Keller, Françoise Dorléac ou d’une éphémère starlette ?
Gilles préfère oublier son tourment, et s’amourache à la folie de Mayliss, une femme « très mariée », aussi fuyante que le fut la mère de notre héros. Il s’engage tête baissée dans cette noire passion.
Elle m’apparaissait tel un continent de solitude dont rien ne pourrait freiner la dérive. Il n’était pas question d’amour. C’était plus grave encore. Mayliss inspirait l’envie d’aimer et la mort qui vient parfois avec cette envie. »
Eric Fottorino conte cette amour somme toute ordinaire. Sauf qu’il la raconte en éclairagiste. Discrètement, il illumine pour nous certains petits moments entre les amoureux.
Comme ici.
La tête contre mon épaule, la bouche entrouverte, elle ne disait rien. Parfois un lampadaire isolé éclairait son visage. »
Ou ici.
Je me levai, Mayliss au bout de ma main, et nous sortîmes, prenant soin de sauter dans les taches de lumière qui dansaient sur le marbre. »
Jusqu’au moment où Gilles accepte enfin la réalité.
Je n’étais pas amoureux, j’étais intoxiqué. »
Pour se libérer de sa dépendance, il part seul à la recherche de sa mère. Alors, Jeanne Moreau, Françoise Dorléac ou une autre ? Je vous laisse la surprise.
Que penser de « Baisers des cinéma » ? A notre tour, jouons des ombres et des lumières. Le côté sombre, c’est une écriture qui traîne parfois un peu la patte. La mécanique des événements est un peu trop visible, comme dans ces films où l’on aperçoit la perche du micro, qui donne un côté burlesque à un moment qui se voulait intense.
Côté lumière, des petits moments très biens rendus et une belle histoire d’amour, avec des personnages parfaitement crédibles. La psychologie est très fine, surtout chez les deux tourtereaux. Les amoureux de la passion et les passionnés de l’amour se retrouveront à coup sûr dans ce tableau. Enfin, les références cinématographiques sont nombreuses mais pas envahissantes, et toujours accessibles aux profanes.
Bref, pas un roman brillant, pas un texte éteint non plus, juste un agréable clair-obscur.
Baisers de cinéma, Eric Fottorino, Gallimard, 189 pages, 14,50 euros.
C’est ce qui me faisait peur dans ce livre qu’il y ait trop de références cinématographiques qui me feraient décrocher, mais, comme tu dis que cette lecture reste accessible aux profanes, donc ça me rassure !! 😉
Finalement, je crois que je vais rester sur son magnifique Korsakov.
Vraiment j ‘ai adoré ce roman très nostalgique sur cette époque merveilleuse de la nouvelle vague française et des cinés qu ‘on se tapait en brossant joyeusement les cours du collège.
Bernard, je te conseille vraiment la lecture de Korsakov. C’est superbe !! Enfin, à mon humble avis !! 😉
😀
ce qui m’a fascinée moi c’est la géographie amoureuse très restreinte des deux êtres la façon de dépeindre la tristesse de Mayliss avec les mots d’un homme de la lumière.
J’ai vraiment beaucoup aimé le style, l’histoire est "agréable" et bien menée. Mais c’et vrai ce n’est pas un livre "inoubliable" mais tout de même "à lire".
Et bien, j’aurais dû venir ici avant de l’acheter, j’ai trouvé le roman assez décevant, bien que distrayant. Aussi reviendrai-je pour faire mes choix. Merci !